Géobiologie, habitat en terre, EcoDome, maison économique en terre

Nader Khalili, (1936-2008photo from LA Yoga magazine

Avec sa structure en arc, cette curieuse maison mise au point par l’architecte Nader Khalili résiste bien aux séismes et, en prime, est aussi écologique qu’économique. Olivier Daniélo en fait la démonstration.

Des habitats rapides à construire pour reloger rapidement des millions de personnes et qui résistent aux tremblements de terre, voilà qui serait idéal à Haïti, après le terrible séisme du 12 janvier. Faudrait-il beaucoup d’argent ? Non. La technologie est-elle sophistiquée ? Non. Les matériaux ? De la terre, des gravats et des sacs en plastique. L’idée vient-elle d’un illuminé ? Non. Elle est connue et expérimentée depuis des années en Afrique, en Asie et en Amérique. Olivier Daniélo, responsable du blog Objectif Terre des hommes, nous explique le principe de l’écodôme, une idée toute simple d’un architecte irano-américain.

Mais pourquoi une telle idée n’a- t-elle pas révolutionné l’habitat mondial ? Pour Khalili, cela s’explique par la puissance des multinationales de construction, du bois (aux Etats-Unis, la plupart des maisons ont une structure en bois), du ciment ou encore de l’acier, qui s’opposeraient par intérêt financier à une telle révolution. L’architecte refuse aussi tout sponsor ou financement privé. Résultat, ses ouvriers sont pour la plupart des étudiants, non rémunérés. Et Cal-Earth ne se développe que par la grâce des bonnes volontés.

( pour voir les trois photos ci-dessous plus grandes, cliquer sur les images )

Pour voir les 200 photos des détails de la construction à Nantes en France en mai 2009 (de Claire Blanchemanche) >> ICI

« Les séismes ne tuent pas. Ce sont les maisons qui font des victimes lorsqu’elles s’effondrent. Si nous construisons des maisons capables de résister aux séismes dans les régions sensibles, les gens auront davantage de chances de survivre si un séisme survient ». C’est ce que l’on peut lire sur le site de Stop disasters, un jeu de simulation créé par l’ISDR (International Strategy for Disaster Reduction), dépendant de l’ONU.

Après une catastrophe naturelle dévastatrice (tremblement de terre, tsunami, incendie, ouragan, inondation…), comment reconstruire rapidement et à faible coût des maisons très solides ?

Nader Khalili, architecte irano-américain et père du concept d’écodôme, a une réponse. «Mes maisons sont construites avec de la terre ou du sable. Elles ne coûtent presque rien. Elles ne peuvent pas prendre feu, elles résistent aux cyclones et aux séismes car elles reposent sur un système d’arcs et n’ont pas d’étage. Un petit dôme en terre peut être construit en trois jours (…). Rien de pire que les maisons carrées en cas de catastrophe naturelle !»

Prendre une feuille de papier. La placer verticalement : elle tombe. La courber pour obtenir un arc, comme avec les murs des moulins : elle tient toute seule. Les dômes sont encore plus résistants, car il s’agit de systèmes d’arcs en deux dimensions. De plus, un dôme a un rapport surface des murs / volume intérieur plus faible que celui d’une structure carrée ou rectangulaire. Ce grand volume pour une faible surface d’enveloppe réduit la consommation de matériaux de construction ainsi que les échanges thermiques. L’association Dhomus le confirme : «ce type de volume offre une extraordinaire résistance aux tempêtes, ouragans et tremblements de terre. Il présente l’avantage d’être particulièrement économique en énergies de chauffage ou de climatisation et c’est en plus un volume très agréable à vivre».

L’intérieur d’un écodôme, version luxueuse.

Un enduit interne a été appliqué sur les sacs de terre.

On remarque que l’ouverture au sommet rend ces habitations très lumineuses.

© Association Cal-Earth

La terre au service de l’homme

Mais la pertinence des constructions de Nader Khalili n’est pas seulement d’ordre géométrique. Ces habitations sont construites avec des sacs emplis de terre, d’où l’appellation écodôme, compte tenu de l’excellence de leur bilan environnemental. La terre est disponible sur place à un coût nul. Les sacs adhèrent fortement les uns aux autres grâce à la disposition de fils de fer barbelés entre chaque couche. Sans fil de fer, les sacs glisseraient, mais la combinaison fils de fer – forme en dôme conduit à une structure aussi résistante qu’un bunker.

Les sacs sont emplis de terre humidifiée et disposés au niveau des murs. Le contenu des sacs sèche alors naturellement. On obtient des grosses briques de terre crue, que Nader Khalili a appelées super-adobe, alliance d’un matériau utilisé depuis des millénaires, la terre crue (adobe) et de matériaux modernes : fils de fer barbelé et sacs en polypropylène (d’où le super). L’écodôme en superadobe est un concept tellement simple qu’il en devient génial. Ces matériaux ne craignent pas les attaques d’insectes (dont celles des termites) ni des moisissures. En cas d’incendie, la combustion du polypropylène ne dégage pas de substances toxiques mais uniquement de l’eau et du gaz carbonique. Il convient de placer une ouverture en sommet du dôme pour assurer un renouvellement naturel de l’air intérieur par convection.

Il faut aussi placer un bon revêtement externe afin de protéger le plastique des ultraviolets (le polypropylène est très résistant mais supporte mal les UV). Au besoin, en climat froid par exemple, on peut également mélanger un peu de paille dans la terre pour améliorer l’isolation des murs. Le revêtement externe est également utile pour protéger la construction de l’eau de pluie.

Dans les pays à fortes précipitations, les constructions en forme de moulin et avec une toiture classique sont envisageables. Ou alors, si l’on opte pour un dôme (plus adaptés aux régions sèches), il convient d’apporter un soin particulier à la qualité du revêtement externe, et éventuellement d’installer un petit toit en forme de chapeau chinois au sommet du dôme. Dans les pays à forte déforestation, un avantage majeur des dômes est de ne nécessiter ni poutres en bois ni piliers pour soutenir le toit. Le choix des structures dépend du contexte climatique local et des matériaux naturels disponibles.

De la Terre à la Lune

Nader Khalili a réalisé ses études en Iran, en Turquie et aux Etats-Unis, où il concevait à l’origine des gratte-ciel. Puis, répondant à une demande de la Nasa, il a élaboré un concept d’habitation pour de futures missions d’exploration de la Lune, utilisant le matériau disponible localement : la poussière lunaire. Il a reçu le prix Aga Kahn d’Architecture en 2004.

Nader Khalili a passé 5 ans à sillonner en moto les déserts iraniens, aidant les populations locales à construire des maisons en terre et améliorant ses recettes d’année en année (l’Iran est un pays fortement sismique). En 1988, un village expérimental d’écodômes en sacs de terre fut construit à Hesperia, en Californie. Ce village a suscité un fort intérêt des responsables du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD). Lors d’une visite en 2001 du site expérimental, Omar Bakhet, le directeur du département urgence du PNUD déclarait à l’agence Reuters : « C’est vraiment extraordinaire, un vrai trésor caché ! C’est une technologie qui a fait ses preuves, qui est très bon marché et qui ne nécessite que très peu de matériaux de construction, juste ce que vous donne la nature. C’est si simple que n’importe qui peut apprendre à construire les écodômes ».

En effet, construire un écodôme se résume à emplir des sacs avec de la terre et à les empiler, ce qui ne nécessite pas de recourir à du personnel qualifié. Un coordinateur donnant les instructions peut gérer la construction de plusieurs maisons en même temps. Les victimes d’un séisme qui sont en bonne forme physique, plutôt qu’attendre désespérément qu’on leur construise une nouvelle maison, deviennent actifs, ont l’esprit occupé et participent à la construction de leur propre avenir, de leur propre autonomie. Il y a un réel plaisir à construire sa propre maison.

Le Haut Commissariat pour les réfugiés a fait appel à la technique de Khalili suite au séisme qui a dévasté des villes iraniennes en 2002. Une centaine d’écodômes y ont été construits en quelques jours. La technique a également été appliquée suite à un séisme au Pakistan. On trouve aujourd’hui des constructions en sacs de terre dans le monde entier : écoles aux Philippines, temple bouddhiste en Thaïlande, crèche à Soweto, orphelinat au Népal, écovillages en Ouganda, maisons particulières au Mexique, au Sénégal en Espagne ou aux Etats-Unis. La liste est très longue.

100.000 personnes relogées pour 200 millions d’euros

Bien sûr, avec un design basé sur des structures en arc, on peut reprocher à ces constructions de ne pas respecter les coutumes architecturales des régions sinistrées. Mais dans les régions à forte sismicité et où les gens n’ont pas forcément les moyens de construire des maisons classiques répondant aux normes anti-sismiques, quand des centaines de milliers de personnes sans ressources n’ont plus de toit, les écodômes peuvent constituer une solution très pertinente à court ou moyen terme, voire à long terme pour ceux qui prennent goût à vivre dans ces constructions naturelles. A noter d’ailleurs que toutes les formes de constructions sont possibles, mais les murs droits sont bien moins résistants que les murs en arc et ne sont donc pas recommandés. Ceci est également valable pour les constructions en briques ou en parpaings.

Un écodôme complet pouvant abriter une famille de 5 personnes coûte environ 10.000 euros. Il peut être construit en quelques jours. Reloger 100.000 personnes (soit 20.000 écodômes) représente un investissement de 200 millions d’euros. Au niveau logistique, il faut envoyer des sacs en polypropylène (un rouleau suffit pour un écodôme complet), des rouleaux de fil de fer barbelé et quelques outils de base (brouettes, pelles, masses etc.), ainsi, bien entendu, qu’une équipe de formateurs-coordinateurs de chantiers (sachant qu’un formateur peut en former rapidement une dizaine d’autres…). Reste alors à trouver un véhicule sur place pour transporter le matériel. Aucune autre solution n’a un potentiel de déploiement aussi rapide, et tout ceci à un coût défiant toute concurrence, avec au final une construction anti-sismique et agréable à vivre.

Appel aux dons pour Haïti

Dans un communiqué du 13 janvier 2010, Cal-Earth – California Institute of Earth Art and Architecture, une association à but non lucratif fondée par Nader Khalili et spécialisée dans la construction d’écodômes – a lancé un appel aux dons, dont on peut lire les détails sur leur site.

Plus d’un million de personnes sont actuellement sans abri à Haïti. Selon les spécialistes en sciences de la terre, des répliques du séisme qui a ravagé plusieurs villes haïtiennes sont possibles dans les jours, les mois et les années à venir. Il est donc très important que la population haïtienne ne retourne pas vivre dans des bâtiments fragilisés. La construction rapide d’écodômes peut y contribuer.

Les gravats issus de la destruction des maisons peuvent être utilisés pour construire les dalles des écodômes. La poussière présente au milieu des ruines peut aussi servir, mélangée à la terre humidifiée, pour remplir les sacs. Le contenu des sacs empilés dans les murs de l’écodôme sèche ensuite au soleil. Pour accélérer le séchage, on peut allumer un feu de bois au cœur de l’écodôme, par exemple avec les débris de charpentes des maisons en ruine. Tout ceci contribue au déblaiement des débris qui encombrent la ville sinistrée.

La motivation de Nader Khalili, décédé en mars 2008, trouvait sa source dans une vision fraternelle du monde. « La vraie forme de pauvreté est la pauvreté de l’espoir. Chaque être humain possède en lui une réserve d’énergie infinie pour qu’il atteigne son but, si et seulement si cette énergie est utilisée dans une dynamique du construire et non dans une dynamique du combattre (…). Je n’ai rien inventé. Toutes les civilisations méditerranéennes ont utilisé la terre sur laquelle elles vivaient pour bâtir (…). Imaginez un monde où tous les réfugiés ont un abri. En plus, cela ne coûte rien. »

Nader Khalili explique la construction d’un EcoDome

Source : http://www.futura-sciences.com/fr/news/t/geologie-1/d/des-ecodomes-pour-reloger-les-sinistres-dhaiti_22257/

Source : http://www.les-vegetaliseurs.com/article-65202-desecodomespourrelogerlessinistresdhaiti.html

Autres vidéos


Ces maisons économiques peuvent être construites en une semaine par trois personnes.
D’une surface de 34 m², selon la configuration de base, elles peuvent accueillir une famille entière.


Écovillage en écodômes

Écovillage en Afrique
Écovillage en Afrique
EcoDome dans les pays froids

Affected Earthquake victim (School Principal) training at Cal Earth Pakistan/Sasi Foundation training site at GHQ, Rawalpindi

Lors du tremblement de Terre en octobre 2005, le Pakistan a construit des maisons en Terre suivant le principe de Cal-Earth Foundation USA, en créant la filiale Cal-Earth Pakistan

http://calearthpakistan.org

Des centaines de photos des constructions sont visibles sur ce site :

http://calearthpakistan.org/pics.htm

Building an earthbag dome

BY ROB WAINWRIGHT

Un document en anglais en pdf de 11 pages qui montre la construction d’un EcoDome en Australie par 4 personnes avec un détail des coûts pour seulement 2500$ de fournitures. Un seul dôme de 4 mètres de diamètre. Une mezzanine pour mettre le lit en hauteur.

http://www.earthbagbuilding.com/pdf/dome.pdf

La maison sur la photo à gauche « La miellerie » est un 12 pieds (intérieur) de diamètre en encorbellement de sacs de Terre en forme de dôme construit en 1996. Le travail a été réalisé en 19 jours. Le coût de tous les matériaux était d’environ 1500 $ (US). Il y a dans ce prix la pelleteuse et le service pour creuser les fondations, le nettoyage de toutes les traces de terre livrées, les sacs, les barbelés, les fenêtre et la porte, les formes en bois pour construire les emplacements des fenêtres et de la porte, les fenêtres et la porte sur mesure.

La « miellerie » est maintenant utilisé comme studio de la rédaction pour OK OK OK Productions.

http://www.okokok.org

La moitié des maisons dans le monde sont en terre

La terre est une matière première ! L’homme l’utilise comme matériau depuis des millénaires pour construire des maisons, même en France. Boudée depuis l’arrivée de son proche cousin le béton, dans les années 50, elle revient au goût du jour. Ses atouts écologiques et esthétiques attirent en effet les architectes contemporains.

Construire une maison en terre ? A l’encontre des idées reçues, ce système de construction est possible pratiquement partout. La moitié de la population mondiale vit dans une habitation en terre crue et non en béton. Ces bâtiments sont écologiques et quasiment inusables : certains sont encore debout après des millénaires. Alors, la terre, une ressource pleine d’avenir ?

Un mur en terre est un assemblage de grains, d’eau… et d’air. Ces trois éléments doivent rester en équilibre pour que la construction tienne.

Certaines habitations en terre dépassent les 8 étages et certaines ont plus de 7000 ans. La terre ne s’use pas, ne rouille pas.

Pour ceux qui souhaitent avoir des informations sur les constructions des maisons en terre, il y a une exposition  en France.
UNE COLLABORATION CITÉ DES SCIENCES / CRATERRE – ENSAG
Première exposition de cette ampleur sur le sujet, « Ma Terre première » pour construire demain dévoile tout le potentiel de cette matière granulaire sous quatre angles : géologique, physique, architectural et artistique.

En collaboration avec CRAterre – ENSAG, la Cité des sciences et de l’industrie propose au public de redécouvrir les vertus de la terre, matière prometteuse à la fois traditionnelle et innovante, du 6 octobre 2009 à juin 2010.

Cité des sciences et de l’industrie
30 Avenue Corentin Cariou, 75019 Paris.
Ouvert du mardi au samedi de 10h à 18h et le dimanche de 10h à 19h.

CRATerre ENSAG, créé en 1979, est un laboratoire de recherche et une équipe d’enseignement de l’Ecole d’Architecture de Grenoble, soutenu par la région Rhône-Alpes et habilité depuis 1986 par la Direction de l’Architecture et du Patrimoine du ministère de la Culture et de la Communication. :

http://www.cite-sciences.fr/francais/ala_cite/expositions/ma-terre-premiere/?skip=1

Préparer sa visite :
http://www.cite-sciences.fr/francais/ala_cite/expositions/ma-terre-premiere/decouvrir.php

La terre est faite de grains :
http://www.cite-sciences.fr/francais/ala_cite/expositions/ma-terre-premiere/decouvrir/terre/edito.php

Vers un allié thérapeutique – la maison comme une peau

Notre santé dépend aussi de l’endroit où nous vivons !

Une architecture adaptée en profondeur à l’être humain et accordée à l’environnement.
Plus que symboliques, ces conceptions ont un but : relier l’homme à l’univers. L’architecture sacrée antique procédait de la même volonté et se trouvait construite en des lieux qui concentrent plus que d’autres des forces vivantes guérisseuses. Epidaure, ville d’Argolide (région montagneuse de l’ancienne Grèce) est célèbre par son sanctuaire dédié à Asclépios (Esculape), dieu de la médecine, car les guérisons qui s’y opéraient en firent un des grands complexes de thérapie de l’Antiquité.

Il faut donc considérer la maison comme une peau qui ne doit pas couper de la nature. Pour cela, on utilisera des matériaux naturels en contact direct avec les forces régénératrices de la nature : brique faite à partir de terre, le bois; le chanvre ou la laine de lin pour isoler; comme revêtement de sol, le linoléum à base de lin; pour habiller les murs, des matériaux et peintures qui permettent de respirer…

Une réflexion globale sur la santé ne peut faire l’économie de tous ces aspects.